
Avec une croissance attendue de près de 35 % et un volume avoisinant 230.000 véhicules, le marché de l’automobile au Maroc signe une année sans précédent.
Pour Cédric Veau, directeur général de Bamotors Maroc (Kia et Geely), cette performance résulte d’une combinaison de facteurs structurels, du dynamisme du tourisme et du rôle central joué par les loueurs.
Dans cet entretien, il livre son analyse sur les moteurs de la croissance, l’impact des marques chinoises, les enjeux de l’électrification et les perspectives du marché.
Un marché automobile marocain à un niveau jamais atteint
Selon Cédric Veau, le marché affiche une dynamique exceptionnelle. Il devrait clôturer l’année autour de 230.000 unités, soit une progression proche de 35 %.
Ce niveau dépasse largement toutes les prévisions formulées auparavant. Il s’agit, de loin, du meilleur résultat jamais enregistré sur le marché automobile marocain. Pour les opérateurs, cette performance constitue une très bonne nouvelle pour l’ensemble de la filière.
Les grands chantiers et le tourisme comme moteurs structurels
La dynamique actuelle repose d’abord sur des facteurs structurels. Les grands projets d’infrastructures et les chantiers en cours irriguent progressivement l’économie. Cette tendance soutient fortement le segment du véhicule utilitaire, qui affiche une croissance soutenue.
Le second moteur est le tourisme, dont les arrivées progressent encore de plus de 15 % sur l’année. Cette performance déclenche des achats massifs de véhicules, en particulier chez les loueurs.
Le rôle central des loueurs dans la croissance du marché
Les loueurs jouent aujourd’hui un rôle déterminant dans la dynamique de l’automobile au Maroc. Ils représenteraient entre 40 % et 45 % des immatriculations, contre une norme habituelle située autour de 25 %.
Cette surreprésentation explique en grande partie la vigueur actuelle du marché, aussi bien sur le segment du tourisme que sur celui de la location professionnelle.
Segments les plus demandés : B Hatchback et SUV en tête
Cette structure de la demande se reflète clairement dans les segments les plus performants. Le marché tire l’essentiel de sa progression du segment B Hatchback, très prisé par les loueurs.
Les SUV du segment C enregistrent également une forte croissance. Ces deux catégories constituent aujourd’hui les produits les plus demandés en location, ce qui explique leur progression plus rapide que le reste du marché.
Une fin d’année marquée par une forte pression promotionnelle
La multiplication des marques présentes sur le marché renforce l’intensité concurrentielle. Chaque acteur cherche à atteindre ses objectifs et à consolider sa présence.
Dans ce contexte, des promotions sont attendues en fin d’année, notamment pour soutenir les volumes et écouler les stocks.
Quelles perspectives après 2025 pour l’automobile au Maroc ?
Pour Cédric Veau, la croissance de 35 % en 2025 constitue un pic exceptionnel. Cette dynamique peut s’inscrire dans la durée, mais elle connaîtra nécessairement des phases d’accalmie.
Un ralentissement est notamment possible au début de l’année suivante, en particulier après la CAN, si les loueurs réduisent leurs achats. Le marché devrait toutefois rester à un niveau élevé, avec une trajectoire de développement qui se prolonge à l’horizon 2030.
Marques chinoises : concurrence accrue et montée de l’hybride
L’arrivée massive des marques chinoises intensifie la concurrence sur le marché automobile marocain. Ces marques disposent encore de peu d’historique, ce qui place souvent le prix au cœur de la décision d’achat.
Elles introduisent également un nombre important de véhicules hybrides rechargeables (PHEV) et hybrides (HEV), moins pénalisés par les droits de douane. Cette offensive contribue à promouvoir l’hybridation, même si le diesel représente encore environ 60 % du marché.
Infrastructures de recharge : une dynamique qui s’accélère
Au-delà des marques chinoises, une volonté plus large émerge en faveur de l’électrification. Les consommateurs comme les pouvoirs publics montrent un intérêt croissant pour les véhicules électriques.
Cette évolution stimule le développement des infrastructures de recharge, avec l’arrivée de nouveaux opérateurs privés. Le mouvement est engagé et devrait s’accélérer dans les prochaines années.
Fiscalité : un enjeu clé pour l’électrique et l’hybride
La suppression de l’exonération de la taxe de luxe sur les véhicules hybrides et électriques aurait, selon Cédric Veau, un impact très négatif. Cette exonération constitue aujourd’hui l’un des rares leviers de soutien à ces technologies.
Sa suppression provoquerait un coup d’arrêt brutal sur le développement de l’hybride et de l’électrique au Maroc.
Véhicule d’occasion et financement : des leviers complémentaires
Le véhicule d’occasion occupe une place centrale dans l’écosystème. Son développement favorise le renouvellement du parc et bénéficie directement au véhicule neuf. Il contribue aussi à professionnaliser la filière, au profit du consommateur.
Côté financement, les niveaux restent élevés. De nouvelles formules émergent, notamment pour l’électrique. Les partenaires financiers jouent aujourd’hui un rôle moteur, en particulier auprès des professionnels.
Un marché en mutation, mais encore perfectible
Interrogé sur les écarts parfois évoqués entre les statistiques de l’EVAM et les immatriculations réelles, Cédric Veau indique ne pas être concerné par ces débats. Bamotors déclare ses chiffres sans entrer dans la polémique.
L’année 2025 marque néanmoins un tournant. Elle confirme que l’automobile au Maroc entre dans une nouvelle phase, plus concurrentielle, plus structurée et plus exigeante.







