Hypersportive : Porsche Taycan Turbo GT, bête de circuit électrique
Prenez une Porsche Taycan Turbo S et incorporez-la dans un shaker en compagnie d’une 911 GT3 RS, puis secouez fort. Vous obtiendrez un cocktail des plus savoureux, la version Turbo GT de la grande berline de Zuffenhausen, la Porsche la plus puissante de tous les temps, la «fossoyeuse» de l’impudente Tesla Model S Plaid !
Début janvier dernier, Porsche faisait sensation en dévoilant la vidéo des exploits, sur le circuit du Nürburgring, d’une version de pré-série de la Taycan Turbo GT, déclinaison radicale de sa «limousine» 100% électrique. Une sprinteuse hors norme aux commandes de laquelle Lars Kern, pilote d’essai de Porsche, a claqué un temps au tour de 7 minutes, 7 secondes et 55 centièmes, améliorant ainsi de 26 secondes le record de la Taycan Turbo S sur la boucle Nord, établi par ses soins en août 2022. Ce chrono homérique a surtout permis de remettre les pendules à l’heure face à une certaine Tesla Model S Plaid, qui a besoin de 18 secondes de plus que la nouvelle championne de Zuffenhausen pour parcourir les 20,832 km de l’Enfer vert.
Ce coup de maître en a appelé un autre. Quelques semaines après avoir dévoilé la version restylée de sa limousine, Porsche vient de publier une vidéo de présentation de la version de série de la Taycan Turbo GT et y a fait essuyer un nouveau camouflet à Tesla et à son boss, Elon Musk. Un affront qui a pour nom «Race Engineer Cockpit», une application développée en partenariat avec Apple, disponible exclusivement sur le tout récent casque de réalité mixte Vision Pro de la firme de Cupertino et dévoilée par le patron de ce géant de la tech, Tim Cook ! Mordus de «track days», cette appli est clairement un «game changer». Elle permet de plonger dans une expérience immersive inégalée, en mode «comme si vous y étiez», de visualiser des tours de piste sur l’Apple Vision Pro, en temps réel et en POV (point de vue du pilote), mais aussi de consulter la carte du circuit, les principales données de télémétrie… Une manière originale pour Porsche de chanter la pomme aux geeks (fortunés) fans de Tesla et de leur faire la cour. En fait, absolument plus rien ne plaide en faveur de la Model S Plaid dans «l’affaire qui l’oppose» à cette déclinaison Turbo GT de la Taycan.
Au plan du style extérieur et de la présentation intérieure, ou encore de la qualité perçue, il y avait déjà un monde, un delta très important entre ces deux rivales. La Taycan enfonce aujourd’hui le clou en privant la limousine texane des petits plus dont elle pouvait se targuer jusqu’à présent. Le petit gap de puissance qui les séparait a été comblé par la firme de Stuttgart, qui a développé pour cela la Porsche de série la plus puissante de sa glorieuse histoire !
Un monstre de puissance
La nouvelle Taycan Turbo GT développe 789 ch en continu, ce qui est inférieur à la puissance affichée par la 918 Spyder, qui était détentrice, du haut de ses 887 ch, du record familial depuis un peu plus de 10 ans, depuis son apparition en 2013. Cependant, grâce à un nouveau mode de conduite baptisé «Attack Mode», la plus furibarde des Taycan peut grimper, dix secondes durant, à 952 ch.
Du reste, lors des phases de départs, un overboost supplémentaire peut faire passer le véhicule, avec l’aide du «launch control», à 1.108 ch ! Un Everest qui ne dure que deux secondes, mais qui permet tout de même de dominer largement la Plaid et ses 1.034 ch. Côté couple maxi, on évolue dans le gargantuesque, là encore : 1.340 Nm, soit 290 Nm de plus que la Turbo S.
Pour être honnête, cette Taycan ne saurait être comparée à la Plaid ni à aucune autre limousine électrique. Beaucoup plus radicale, elle a fait l’impasse sur la polyvalence proverbiale des autres Taycan et a suivi une cure d’amincissement des plus draconiennes – sièges baquets en carbone, jantes forgées de 21 pouces, freins carbone-céramique, etc. De quoi lui permettre d’afficher 75 kg de moins que la Taycan Turbo S sur la balance. Mais elle peut encore aller plus loin en optant pour le Pack Weissach, qui lui permet de sacrifier les places arrière sur l’autel de la performance (façon Giulia GTAm ou M4 CSL) et d’hériter d’un imposant aileron arrière fixe, de même que d’un plancher parfaitement plat. Le mot est lâché : «Weissach» ! Jusqu’à présent, seules la 911 GT3 RS et la 918 Spyder ont eu droit à ce package ultra-sportif. La Taycan Turbo GT est à classer dans la même catégorie que la plus pistarde des 911 et que l’hypercar PHEV. C’est la raison pour laquelle elle a collé près d’une demi-minute à la Turbo S et 18 secondes à la Model S Plaid sur un tour de la Nordschleife ! La différence de puissance et le delta de poids auraient dû permettre de gratter à ces deux-là deux ou trois secondes au tour, tout au plus.
D’ailleurs, les gains en termes de performances pures ne sont pas vraiment conséquents : la Turbo GT pulvérise le 0 à 100 km/h en 2,3 s (2,2 s pour les versions équipées du Pack Weissach). À mettre en perspective avec le chrono de 2,8 s de la Taycan Turbo S et les 2,1 s revendiqués par la rivale de chez Tesla.
Les chiffres ne disent pas tout
Comment expliquer alors la forme étincelante affichée par la Turbo GT sur le Nürb’ ? La réponse est limpide : les metteurs au point de Porsche ont encore frappé. Ces doctes sorciers ont revu trains roulants et liaison au sol pour gagner en efficacité sur circuit. Ils ont repensé la suspension Active Ride de la Turbo S et ont appelé en renfort des pneus spécifiques. Evidemment, la Tesla Model S Plaid gardera des aficionados. Ceux-là feront noter qu’elle est toujours plus rapide sur le 0 à 100, qu’elle affiche une autonomie supérieure (723 km pour la déclinaison «Grande autonomie», contre 556 km pour la Porsche). Mais ceux qui «savent» n’hésiteront pas une seule seconde. En matière de «handling», d’agilité, de freinage, la marque capable de tenir la dragée haute à Porsche n’a pas encore vu le jour.
Mehdi Labboudi / Les Inspirations ÉCO AUTOMOBILE